LA VIE QUOTIDIENNE en EGYPTE ANTIQUE
Quatrième rencontre égyptologique
du 14 juin 2014
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La première conférence fut celle
d'Amandine Marshall:
Originaire de Toulouse, Amandine Marshall débute des études
d’égyptologie à l’Université Charles-de-Gaulle Lille 3 en 1998 et
rejoint l’équipe de l’Halma-Ipel-UMR 8164/CNRS-Lille3, en qualité de
membre associé. Dès 2005, elle participe à la Mission Archéologique
Française de Thèbes-Ouest (MAFTO-LAMS/UMR 8220 CNRS), dont elle devient
un peu plus tard chercheur associé. Au Ramesséum, ses recherches
portent notamment sur le secteur APS (fouille de l’allée
processionnelle sud). En 2008, elle se voit confié le soin de créer un
musée à la mémoire d’Auguste Mariette à Boulogne-sur-Mer (projet
abandonné depuis).
Docteur en Égyptologie, elle travaille actuellement sur plusieurs
projets de publications scientifiques, dont ses travaux de thèse
portant
sur les enfants en Egypte ancienne, du Pré- dynastique à la fin du
Nouvel-Empire.
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De la femme à l'enfant:
Maternité et petite enfance en Egypte
ancienne
Tout d'abord une petite "mise en bouche" offerte par François
du Forum égyptologique ddchampo:
"Conception, contraception, grossesse,
naissance et petite enfance sont les sujets qu'elle développera pour
nous.
Elle se taille un véritable succès
avec ses tampons vaginaux aux excréments de crocodile et éléphant,
le tout adouci par un peu de miel, faut bien s'accorder un peu de
douceur!
Et, surtout, elle veut couper le cou à l'expression
"mèche de l'enfance"!!!
Elle développera pour vous, si
elle le souhaite, mais sachons que d'une part ce n'est pas la
coiffure la plus représentée chez l'enfant, et que d'autre part,
elle n'est pas forcément symbole de l'enfance mais bien plus sûrement
de la jeunesse.
Donc mèche de la jeunesse, et plus mèche de
l'enfance!!! Tenez-vous le pour dit !!!"
Le résumé qui suit nous est fourni intégralement par
Amandine Marshall, mais les illustrations, pour la plupart, ne
seront pas celles données lors de la conférence, car non libres de
droit.
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Introduction
La
maternité a toujours été, de tout temps et de toute culture, une
étape fondamentalement importante. Souhaitée pour de diverses
raisons, la maternité pouvait cependant ne pas être voulue, tant
pour des raisons de confort, de santé que pour des raisons moins
avouables. Dans une première partie, nous avons vu les
préoccupations des anciens Egyptiens face au désir d’enfant, à
la stérilité et à la contraception. Puis nous nous sommes penchés
sur le temps de la grossesse et celui de la naissance. Enfin, nous
avons étudié le temps de la petite enfance et la perception que les
adultes avaient de ce premier temps de vie.
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I.
Le désir de maternité, les problèmes de stérilité et le choix de
la contraception
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Quand l’attente
se
faisait longue, ou trop longue, les Egyptiens sollicitaient l’aide
des dieux : Min, Khnoum, Bès, Heqet, Isis, Hathor, Thouéris ou
encore Nout. Chacun à leur manière et selon leurs attributions et
leurs spécificités, apportait leur concours à la femme pour
qu’elle soit enceinte. Prières, offrandes, dépôt de statuettes
de fertilité ou figurant des enfants, recours aux décrets
oraculaires, toutes sortes de moyens étaient mis en œuvre pour que
les suppliques parviennent aux dieux. Les revenants pouvaient
également être sollicités par les Egyptiens. En effet, les morts
passaient pour avoir une influence sur le monde des vivants, qu’elle
ait été bonne ou néfaste. Dans le cas présent, les premiers
témoignages de lettres adressées aux défunts pour des affaires de
fécondité ou de stérilité datent de la fin de l’Ancien Empire
et sont souvent rédigés sur des supports très simples comme des
jarres.
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A
côté des dieux et des défunts dont l’aide était considérée
comme précieuse, on recourait bien évident aux sciences
médico-magiques en portant diverses amulettes comme le nœud d’Isis,
de couleur rouge, comme le sang et destinée à protéger une femme
enceinte d’une fausse couche, ou en suivant à la lettre les
recommandations édictées par les praticiens. Ces derniers
avaient mis au point de véritables tests de grossesse permettant de
vérifier l’état d’une femme à un moment donné
Si
la fécondité était recherchée, elle pouvait également ne pas
être souhaitée pour diverses raisons, entre autres par
les Egyptiennes qui ne souhaitaient tout simplement pas avoir
d’enfants, comme les femmes récemment accouchées ou les
prostituées. Les moyens de contraception ne requéraient pas
nécessairement l’assistance d’un médecin et plusieurs
méthodes étaient proposées pour éviter de se retrouver enceinte,
comme les tampons contraceptifs et les injections vaginales.
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Nœud d'Isis
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II Le temps de la grossesse.
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Le temps de la
grossesse
est une période transitoire de plusieurs mois où le corps de la
femme change. Pourtant, l’iconographie égyptienne s’est très
peu attardée sur la représentation de femmes enceintes. Celles qui
le sont, sont généralement évoquées à travers des vases
anthropomorphes dont la panse souligne leur ventre rebondi.
Vases
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Ahmès,enceinte d'Hatchepsout
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Les praticiens
égyptiens
ont mis au point diverses techniques utilisées durant le temps de la
grossesse permettant de diagnostiquer, à l’avance, si
l’accouchement de leur patiente se déroulera dans de bonnes
conditions ou, au contraire, si des complications seront à prévoir.
Ces techniques reposent sur un ensemble de méthodes (observations
variées, rituels et expérimentations en tout genre) censées
orienter avec certitude les conclusions du médecin
Les
incantations magiques recensées expriment principalement les
craintes que les anciens Égyptiens éprouvaient vis-à-vis des
fausses-couches qui ôtaient la vie de leur enfant en emportant
parfois celle de la mère. Dans l’antiquité, on croyait que,
durant le temps de la grossesse le flux menstruel continuait à
couler, mais à l’intérieur du corps. Logiquement, un
bouleversement de ce processus interrompait le cours naturel des
choses et toute perte de sang était annonciatrice du décès "in-utéro"
de l’enfant.
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III Le temps de la naissance
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Le
temps de la naissance se décompose en trois phases distinctes. Il y
a, en premier lieu, la phase du travail, correspondant à
l’imminence de l’accouchement ; l’accouchement à
proprement parler et enfin, l’arrivée et l’accueil du
nouveau-né.
Le temps de la
naissance
débute logiquement avec la mise en place de divers dispositifs
apotropaïques. Ils consistent principalement en incantations
destinées à s’assurer la protection des dieux au moment crucial
en rituels magiques et en traitements que le médecin-magicien
recommande de suivre pour favoriser les conditions de l’accouchement
et soulager au mieux les douleurs de la parturiente.
Plusieurs
incantations, à
réciter lorsque la femme entrait en travail, nous sont parvenues.
Certaines célèbrent dans la joie l’arrivée du nouveau-né quand
d’autres se concentrent sur la douleur de la future mère.
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temple d'Hathor à Dendérah
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L’accouchement est
un
moment de vie privée particulier et il n’est généralement pas
documenté, dans quelque aire chrono-culturelle que ce soit. Il n’y
a donc aucune raison pour que la civilisation égyptienne fasse
exception à cette règle. Cependant, quelques sources ponctuelles
émanant de textes, de scènes figurées, d’éléments
lexicographiques ou de réminiscences culturelles permettent de
recueillir quelques faits concrets sur la façon dont se déroulait
l’accouchement en Égypte ancienne.
Malgré
tous les efforts des médecins-magiciens et des sages-femmes, les
risques à l’accouchement étaient très forts, tant pour la mère
que pour le nouveau-né et la mortalité périnatale était très
élevée à l’époque pharaonique. On estime qu'un enfant sur trois
mourait à la naissance ou dans la période périnatale et que la
moitié des enfants n’atteignait pas l’âge adulte. Les causes de
cette mortalité infantile néonatale étaient généralement dues à
des malformations mais aussi à des infections qui pouvaient survenir
très rapidement.
Des tests de
viabilité
de l’enfant furent donc mis au point par les praticiens pour
déterminer ses chances de survie en période périnatale.
Si les dieux
jouaient un
rôle important dans la vie quotidienne en Egypte ancienne, ils
étaient particulièrement présents, d’avant la conception de
l’enfant où ils étaient évoqués pour permettre à l’Egyptienne
d’être enceinte, à l’après naissance de l’enfant sur lequel
ils devaient veiller avec une attention toute particulière.
La protection
divine
était sollicitée au moyen des traditionnelles prières et amulettes
que l’on accrochait au cou, aux poignets, aux chevilles et aux
hanches des nourrissons. D’autres objets apotropaïques passaient
pour veiller sur le nouveau-né, parmi lesquels, les ivoires
magiques. Ces objets, taillés généralement dans l’ivoire
d’hippopotame, étaient, de ce fait, plutôt manipulés dans les
sphères des classes aisées. Ils étaient utilisés au moment de la
naissance mais également après l’accouchement où ils étaient
employés plus spécifiquement pour protéger les nourrissons.
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le hiéroglyphe ms(mès) représentant la femme qui accouche
Brique d'accouchement
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IV La petite enfance
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Dans la
civilisation
égyptienne, durant sa gestation dans le ventre de sa mère, l’enfant
en devenir était déjà placé sous la protection de multiples
divinités et objet de diverses attentions. Passés les premiers mois
périlleux et souvent fatals aux nourrissons, les enfants en bas âge
demeuraient fragiles. Ils restaient dépendants des femmes qui les
allaitaient et des adultes en général qui les entouraient de soins
physiques et spirituels.
L'allaitement
maternel était primordial et la première inquiétude de la nouvelle
mère était de ne pas pouvoir l'assumer. Il existait des formules
magiques et des recettes médicales pour favoriser la montée du lait
et éviter qu'il ne tarisse.
La tétée n’était
pas
exclusivement effectuée par l’entremise de la mère. Elle pouvait
également l’être par une nourrice dont on s’attachait les
services pour divers motifs : décès ou maladie de la mère,
arrêt de la sécrétion lactée, lait vicié résultant par exemple
d’une infection du sein, lait ne convenant pas à l’enfant, ou
tout simplement pour des raisons de confort.
Enfin, il ne
faudrait pas
commettre l’erreur de généraliser l’âge de 3 ans évoqué dans
la Sagesse du scribe Ani à propos du sevrage des enfants. En Egypte
ancienne comme encore aujourd’hui dans certaines campagnes
égyptiennes, les gens n’ont qu’une idée approximative de leur
âge ou de celle de leur progéniture, tout simplement parce qu’ils
manquent de repères chronologiques. En outre, une source égyptienne
évoque du pain et des dattes dans l’alimentation de l’enfant en
bas âge. L’allaitement n’était donc pas l’unique source
d’alimentation des plus jeunes. Malheureusement, les sources sont
très rares sur le sujet.
Les Egyptiennes
des
élites pouvaient recourir au soin d’une nourrice pour s’occuper
de leur enfant et éventuellement l’allaiter. Les femmes des
classes les plus populaires ne pouvaient compter que sur elle-même
ou éventuellement sur les autres enfants de la maisonnée quand il y
en avait. Quand les nourrissons ne sont pas simplement portés dans
les bras d’une femme ou fillette, ils sont souvent figurés
enveloppés contre leur poitrine, dans un lange qui les enserre tout
en permettant à la porteuse de dégager un ou deux bras.
S’il est difficile
d’affirmer que sous ces langes, les nourrissons sont nus, il est un
fait avéré que l’iconographie a très largement privilégié la
représentation des enfants en bas âge dépourvus de vêtements.
S’il était coutumier aux Egyptiens de laisser les plus jeunes nus
plutôt que de les habiller, les températures hivernales, bien que
plus clémentes qu’en France, interdisent de penser qu’on
laissait nus ces êtres particulièrement fragiles.
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Isis allaitant Horus
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Dans une
société comme
la nôtre, où la médecine s’est hautement perfectionnée et s’est
ouverte à tous, il est parfois difficile d’imaginer l’importance
de la maternité et du combat de tous les instants que les anciennes
Egyptiennes – comme du reste, toutes les femmes des époques
précédentes et de nombreuses femmes malheureusement encore
aujourd’hui – accomplissaient pour mener leur grossesse à terme,
sachant qu’à chaque fois elles pouvaient perdre leur bébé et
leur vie. La quantité de tests, de potions et autres rituels par
lesquels elles devaient passer nous montrent bien sûr la crainte des
anciens Egyptiens, mais également les atroces moments tant physiques
que mentaux que les futures mères devaient vivre pour s’assurer du
bon déroulement de leur grossesse et de leur bonne santé. Et il est
d’autant plus terrible de se dire qu’après le temps de la
grossesse, qu’après le temps de la naissance, s’ouvrait une
nouvelle période d’inquiétude pour la mère (et bien sûr le
père) quant à la survie de son enfant. Les enfants étaient
perçus, en Egypte ancienne, comme des dons de dieux mais également
comme un moyen. Devenir mère conforte le statut de l'Égyptienne au
sein de son couple et dans la société. Sa capacité à engendrer
des enfants et un héritier lui permet d'éviter une éventuelle
répudiation pour motif d'infertilité et ainsi, l’humiliation dans
la sphère communautaire. Et devenir père permet à l'Égyptien
d'asseoir également son statut dans la société car, tout comme la
femme, il est déconsidéré aux yeux de ses pairs quand son mariage
demeure stérile. En outre, être le père d'une progéniture
nombreuse est l'assurance d'avoir une descendance qui l’aidera, lui
succèdera et s’occupera de lui dans ses vieux jours. Les enfants
étaient donc extrêmement choyés dans la société égyptienne mais
également au sein du foyer puisqu’il n’y a pas de famille sans
enfant.
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Quelques dieux protecteurs:
Bès
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Nout
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Taouret
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Isis-arbre
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Hathor |
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