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Passons maintenant à ses nombreux visiteurs illustres qui, dès
1737 en parlent, avec, pour le premier témoignage, un anglais: Richard
Pocoke, qui en fit un relevé au moment de l'inauguration du canal de
Suez. Puis au moment de l'expédition d'Égypte en 1798, deux ingénieurs
des mines en firent un plan déjà très précis: Jollois et Devilliers ;
Champollion y aurait fait un passage mais était trop malade, souffrant
de la chaleur, pour s'y arrêter. Il faudra attendre 1881 pour que cette
tombe commence à être sérieusement étudiée par Johannes Düemichen,
fondateur de l'institut d'Egyptologie de Strasbourg. Il releva un plan
complet de toutes les salles et de certains textes gravés mais n'eut
pas le temps d'achever son travail après la publication de deux tomes,
sur les
7 prévus, décédant en 1894. Les conditions de travail étant exténuantes
de par de nombreux facteurs contraignants:
l'air irrespirable, chargé d'ammoniaque dû aux déjections des
innombrables chauves-souris, l'obscurité, les puits nombreux et larges
barrant toute la largeur des couloirs, son aspect labyrinthique,
contribuèrent à nourrir une réputation de mystère et de malédiction.
Personne ne voulant plus y travailler, Maspéro décida de murer la tombe
afin de se débarrasser des chauves-souris et le service des Antiquités
s'en servit d'entrepôt pour les fouilles alentour. Elle fut donc
inaccessible pendant pratiquement un siècle avec quelques visites dont
celle de Eigner qui en établit un plan précis et coté, publié en 1984.
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Le décor étant planté, nous pouvons passer à la visite...
Il ne reste rien des 2 cours précédant l'entrée proprement dite ni de
l'enceinte à redans de 110m de long et 90 de large dont les fondations
de 3 m de large descendaient à 5 m de profondeur pour atteindre le sol
calcaire. Au niveau de la 2e cour, il reste des piliers sans décoration
ni texte. Le porche d'entrée sculpté très finement comporte des
scènes ayant conservé leurs couleurs et l'on y voit Padiaménopé
recevoir la Grande Offrande Funéraire; les salles I et II , à piliers,
comportent les textes du "Livre pour sortir au jour", avec plusieurs
versions des
textes du "Livre des Portes", et "l'Hymne Solaire"; la salle III,
dédiée au
culte, contient une fausse-porte avec de chaque côté des formules des
"Textes des Pyramides". Entre chaque passage, on voit Padiaménopé qui
marche vers l'entrée avec sa mère, puis avec sa femme en s'adressant
aux vivants, avec ses titres de "Prêtre Lecteur en chef d'Hathor" et
"secrétaire particulier du Roi" puis "Prêtre Lecteur en chef de Nekhbet
". Cet ensemble présente les caractéristiques d'une tombe classique.
Poursuivons notre avancée... les salles suivantes nous font pénétrer
dans le palais funéraire : la porte donnant sur la salle IV marque le
passage dans le lieu de sépulture, de style architectural de l'Ancien
Empire, là aussi accompagné de sa mère, il suit Maât et Anubis.En
continuant nous prenons la direction de la grande descenderie avec les
salles VI, VII, VIII qui présentent l'aspect des tombes de la Vallée
des Rois (notamment la tombe de Ramses II) avec différents chapitres du
"Livre de la sortie au jour" qui nous mène à la salle IX, la "salle du
jugement"
d'Osiris (où un puits descend à une première salle non déblayée et
continuant plus bas, restant à explorer) et aux salles X (avec deux
versions
différentes du Rituel des Offrandes) et XI (formules des Textes des
Pyramides avec un bloc taillé dans la roche au sol simulant un
sarcophage ?) de style Ancien Empire, présentant la disposition interne
des pyramides à textes. Il faut faire demi-tour jusqu'à la salle V pour
entrer dans les salles cultuelles XII et XIII. L'entrée de la salle XII
est la seule à présenter des restes de système de fermeture, laissant
supposer que l'accès était "privé"; au fond se trouve un puits, qui
mène aux caveaux et prend toute la largeur du passage pour rejoindre la
salle XVIII, causant de nombreuses chutes . Sur les murs on trouve
différents chapitres du "Livre des Portes", de "l'Amdouat", des
"Litanies du
Soleil", du "Livre de la Nuit". Au passage de la porte, on peut lire
une
"malédiction" pour ceux qui ne prononceraient pas les formules: "il
sera maudit par le dieu de la ville, il n'aura pas d'enterrement et on
lui crachera au visage", ce qui a participé aux mythes développés au
cours des découvertes des siècles précédents, suite aux péripéties dues
au manque de lumière, aux bougies qui s'éteignent, faute d'oxygène dans
cet air irrespirable, aux chauve-souris affolées. Une fois le puits
passé,
la salle XIII ("salle du cénotaphe" d'Osiris) se présente à nous comme
un immense sarcophage de 15 m sur 15 taillé dans le roc, présentant aux
angles les traces de déesses aux ailes déployées et sur le pourtour une
surface à redans avec une succession de portes (15), rappelant la
structure de Djoser, et de 22 chapelles (style Nouvel Empire) qui
semblent
avoir eu le rôle de lieux de cultes de substitution. Côté sud, le
couloir se prolonge en formant un coude pour se terminer sur
l'emplacement
d'une stèle fausse-porte, semble-t-il.
Au passage de la XIIIe porte, un message prie le passant de
rénover ce qui se détériore et de compléter son oeuvre.
Comme nous pouvons le voir sur le plan, on trouve, dans le couloir Nord
3 chapelles (comme dans le complexe de Djoser): la salle XIV:"le
chateau du
Natron", la salle XV:"le château d'Hemag" (forme d'Osiris dans les
cultes
saïtes, mise des bandelettes); et la salle XVI: "le château de l'Or"
(mise au
tombeau), le tout formant le culte djémaïque
Sur les parois externes de la salle XIII sont gravés les
textes de l'Amdouat.
Maintenant, un peu de spéléo (dont notre conférencier est friand et
peut donc joindre l'utile à l'agréable) pour descendre le puits partant
de la salle XII et menant aux caveaux XIX, XXI et XXII. On
traverse la salle XVII, petite pièce débouchant sur un long couloir de
10m (XVIII) pour arriver au premier caveau (XIX). Au sol, on trouve la
trace d'encastrement d'un dispositif dont on ignore la composition,
peut-être un dais cachant un catafalque? Sur les murs, on peut lire
une version du "Livre des Cavernes" et voir une représentation du
réveil d'Osiris, comme dans les tombes de Ramses VI et IX, ainsi que
dans le cénotaphe d'Osiris à Abydos. Pour continuer, il faut descendre
un nouveau puits de 6 m où l'on débouche sur un caveau carré au plafond
cintré et aux parois décorées de redans représentant 14 portes , 4
pour chaque côté et 2 pour l'entrée. Chaque porte décrit le défunt
comme un "imakhou" auprès d'Amon et Khonsou pour le mur sud, Atoum,
Ptah, Sokar et Osiris pour l'ouest, Montou, Anubis, Hathor à l'est. Au
fond de la paroi nord, était caché au plafond, par un bloc rocheux lui
aussi à redans, un passage menant à la salle XXII ou salle du "grand
caveau" par une sorte de niche. Il se trouve exactement à l'aplomb du
cénotaphe, long de 9,5m et large de 5 avec une voûte en plein cintre de
5 m de haut.
On peut apercevoir des niches de chaque côté ( au nombre de
7), contenant sans doute des statuettes comme on le retrouve dans la
tombe de Montouemhat. Sur la paroi nord: une niche-porte; sur les murs,
on peut voir une version complète de "l'Amdouat" et des passages du
"Livre
de la Sortie au Jour"; au plafond, une magnifique représentation des
constellations.
La visite n'est pas terminée car un puits descend, donnant sur une
petite pièce où l'on a retrouvé des morceaux de bois dans les déblais,
restes d'un sarcophage, et d'une momie laissant supposer que
Padiamenope
repose bien en ces lieux. Les prochaines fouilles nous en apprendront
plus ...
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Qui était Padiaménopé?
Il vivait à l'époque Saïte, soit au VIIe siècle avant notre
ère. On trouve peu de renseignements sur sa famille, on le voit avec sa
femme Tadi "Chanteuse d'Amon" à la 3e porte puis il nous accueille à la
4e porte en compagnie de sa mère Namenkhetaset "Musicienne d'Amon", et
de son fils dont le nom a été effacé, sur le linteau de la porte VI.
Dix statues à son effigie ont été retrouvées avec des inscriptions
quasiment muettes quant à sa famille directe, développant les oncles et
tantes. Nous avons la citation d'un oncle du côté maternel comme
"Prêtre-Lecteur en chef de Nekhbet".
Ses titres: "Secrétaire particulier du Roi"; "Prêtre lecteur en chef de
Nekhbet", donnant un rôle dans les rituels thébains de la Royauté;
"Prêtre des deux Diadèmes", titre souvent porté par l'élite thébaine
liée au clergé de Montou, donc peut-être
chargé des Couronnes Royales, "celui qui orne la Grande de magie". Dans
le temple proche de Djemé, son nom est gravé sur la porte Nord,
ce qui pose question car c'est un fait unique dans un espace de culte
divin. Dans le cas d'un réemploi, son nom aurait été martelé. Sous quel
roi servait-il ? On pense à une période s'étendant de Taharqa
(koushite)
à Psammétique Ier (saïte) mais aucun cartouche n'a été retrouvé pour le
moment. Est ce une volonté d'être intemporel, apolitique ?
Quelle vocation pouvait avoir cette tombe, à la fois musée,
bibliothèque , temple? Padiaménopé était -il tout à la fois archiviste,
archéologue, bibliothécaire? Souhaitons que les réponses nous soient
bientôt apportées au cours des prochaines fouilles.
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